Canton du Valais/Wallis (VS) |
|
Histoire |
Bref aperçu de l'histoire du Valais, tiré de la préface du livre de Michel Salamin, Le Valais de 1798 à 1940, Edition du Manoir Sierre
Depuis quand lhomme habite-t-il le Valais ? En dépit de
leurs recherches, les préhistoriens ne nous fournissent pas de
réponse précise.
Sans exclure la possibilité de découvertes, il ne semble pas
que les périodes paléolithique et mésolithique nous livrent
des témoignages de nos lointains ancêtres. En réalité, la
préhistoire valaisanne commence avec le néolithique. De
chasseur, lhomme devient alors sédentaire. Il colonise le
pays il domestique quelques animaux, il cultive le blé et
lorge, il se construit des habitations. Entre les
différentes localités se nouent des relations commerciales. Les
vallées et les cols alpestres servent de lieu de transit aux
objets et aux hommes.
Il est toutefois impossible destimer limportance de ces échanges. Les nécropoles mises à jour à Glis, à Granges et à Collombey-Muraz ainsi que les objets isolés découverts dans plus dune vingtaine de localités ne permettent pas encore de comprendre comment sest effectué le peuplement du pays. Il convient donc de partager la réserve du savant qui a le plus contribué à la connaissance du Valais de cette époque. «En conclusion, écrit le professeur Marc-R. Sauter, disons encore une fois combien il faut regretter la pauvreté du Valais en vestiges sûrement attribuables au Néolithique. Ce pays recèle certainement encore beaucoup de documents, le long de la vallée rhodanienne, comme sur les hautes pentes qui aboutissent aux Alpes bernoises et aux confins piémontais. Il faudra du temps, de la méthode et de la peine avant quon puisse reconstituer les grandes lignes de lévolution du Néolithique valaisan et comprendre ses rapports avec le Néolithique des régions voisines. »
Vers 1800 av. J.-C., le Valais entre dans lâge du bronze, quand la vie sy laisse pénétrer par des courants commerciaux, culturels et militaires venus particulièrement de lEst européen. Marchands, guerriers et artisans étrangers se mêlent aux populations indigènes; ils leur apportent des connaissances nouvelles. On constate le fait sans pouvoir en expliquer la chronologie jusquau Vile siècle, début de lâge du fer.
Durant cette période, le Valais, semble-t-il, possède une culture particulière que des préhistoriens allemands désignent du nom de «Walliser Kultur» ou de «Rhonekultur». Les ustensiles domestiques, les armes, les instruments de chasse et les bijoux se comptent par milliers. Ils attestent lintensité de la vie dans le Valais central ainsi quen aval de Saint-Maurice. Les influences orientales, particulièrement hongroises, de certains bijoux autorisent à penser que les relations commerciales sintensifient alors.
Au Ve siècle av. J.-C., la civilisation gauloise se manifeste dans le Valais. Quelques tribus celtes sy installent au cours de leurs pérégrinations à travers lEurope et lAsie mineure. Ce sont les Uhères dans les districts alémaniques actuels, les Sédunes dans le Valais central, les Véragres dans la région martigneraine et les Nantuates dans la plaine qui sétend de Saint-Maurice au lac Léman.
Des Romains à la formation de lEtat valaisan
Grâce au Bellum Gallicum de Jules César, on dispose de quelques renseignements sur les habitudes militaires de ces peuplades, clairsemées sur le territoire des Nantuates, plus populeuses entre Fully et Erschmatt et moins denses dans le pays des Ubères. Pour connaître ces populations constamment vouées à lagriculture et à lélevage, il faut recourir aux trouvailles archéologiques et au mobilier funéraire mis à jour plaques de ceinturon, fibules, brassards et «colliers valaisans» dont les caractéristiques permettent de délimiter le territoire de chaque tribu. Les monnaies éparses sur le trajet des routes de transit signalent les voies déchanges celle du Grand Saint-Bernard, celle du Simplon et celles des Alpes orientales.
Après léchec de lexpédition de Galba, les troupes romaines reviennent sous Auguste. Pendant quatre siècles, Rome modèle le Valais de son influence civilisatrice. Les populations y sont réunies en une Civitas Vallensium avec Octodure (Martigny) pour chef-lieu. Dans cette ville, tout au moins, lintensité de la vie culturelle et économique est rendue évidente par le forum, lamphithéâtre et les quartiers dhabitation récemment découverts. Limportance de la localité sexplique par son emplacement sur la voie de communication entre Rome, lHelvétie, les Gaules et la Haute-Germanie.
Les routes favorisent aussi la diffusion des idées. Au cours de plusieurs siècles, des missionnaires substituent dans le Valais le christianisme au paganisme. Paul Aebischer, qui sest appliqué à en comprendre le développement, conclut en ces termes «Ayant eu son lointain point de départ à Lyon, le christianisme a agi dabord sur Octodurus et le Bas-Valais; il a monté lentement le Rhône, après avoir peut-être reçu un appui de forces venues dItalie par le Summus Pninus; enfin il paraît sêtre rencontré, à une époque déjà tardive, à lest du Deischberg, avec des éléments qui, directement ou indirectement, étaient émanés de cette vieille station missionnaire quétait Disentis. Le Valais est une quintessence de la Suisse . une terre de rencontres.»
Au terme du IVe siècle, lévêque Théodore, fondateur du siège épiscopal dOctodure, exhume à Saint-Maurice les ossements des soldats thébains dont lempereur Maximien a décidé la mort à la fin du 111e siècle. Il fait construire une basilique en leur honneur; les pèlerins sy rendent en cohortes sans cesse renouvelées. Soucieux dentretenir chez les fidèles le souvenir des glorieux martyrs, Saint Eucher, évêque de Lyon, écrit avant 450 sa Passio Acaunensium martyrum.
A cette époque, Rome se sent menacée. Des hordes de barbares se concentrent sur ses frontières du Rhin et du Danube. Les Burgondes sinstallent en alliés entre lAar et la Loire; ils y établissent un royaume rhodanique dont le Valais fait partie. Leur roi Sigismond inaugure, le 22 septembre 515, le monastère dAgaune. Labbé Ambroise y organise la laus perennis. Moins dun siècle plus tard, la Burgondie est annexée par la monarchie franque. Mais quand larrière-petit-fils de Charlemagne, Charles le Gros est déposé en 887, lempire carolingien se disloque. Rodolphe, comte dAuxerre, se fait proclamer roi de la Bourgogne transjurane, en 888, à Saint-Maurice même.
Lexistence du second royaume de Bourgogne est mise en péril par les rivalités de la noblesse. Les rois sappuient sur lautorité des prélats afin dassurer leur propre pouvoir. Cest ainsi quen 999, le roi Rodolphe III confère les droits comtaux sur le Valais à lévêque de Sion, Hugues et à ses successeurs. LEtat du Valais commence à cette date.
Les guerres contre les seigneurs étrangers
Deux puissances se partagent alors le territoire du Valais lévêché de Sion et labbaye de Saint-Maurice dont les possessions sont formées de territoires disséminés dans la vallée du Rhône. Une troisième, la Savoie, y prend pied quand, à la mort de Rodolphe III, le comte Humbert aux Blanches Mains apporte son concours à lempereur Conrad II. Son aide lui vaut dinstaller son fils Aymon en qualité dévêque de Sion et de prévôt de Saint-Maurice.
Lenchevêtrement des seigneuries favorise dès lors les risques de conflits dans le pays; la violence des murs y trouve loccasion de se manifester; les passions partisanes, celle de ne point se contraindre. Les guerres se déroulent dabord contre les Zaehringen dont les prétentions sont définitivement brisées par lévêque Landri de Mont, à Ulrichen, en 1211. Elles se poursuivent contre la Maison de Savoie. Celle-ci ambitionne de semparer de tout le Valais pour faire pièce aux menaces alémaniques ou milanaises sur la route du Grand Saint-Bernard. Quand lévêque Henri de Rarogne monte sur le trône épiscopal et s allie à Berne afin de protéger les biens de son Eglise, le comte Pierre Il de Savoie, surnommé le «Petit Charlemagne», envahit le Valais, à limproviste. Il sempare des châteaux de Martigny, du Crest sur Ardon, de Chamoson et de Montorge. Par les traités des 2 juillet et 5 septembre 1260, rendus définitifs en 1262, il oblige lévêque à reconnaître la Morge de Conthey comme frontière entre la Savoie et le Valais. Son successeur et frère, le comte Philippe, signe avec le même prélat un traité qui restitue à lévêché ses seigneuries enlevées en aval de la Morge et qui rend à la Savoie ses anciennes terres dans le Haut-Valais. Cette paix dure jusquau milieu du XIVe siècle.
Les luttes contre la noblesse indigène
Aux guerres contre les Zaehringen et la Maison de Savoie font suite les luttes contre la noblesse indigène dont les sires de la Tour et de Rarogne sont les plus illustres représentants.
Lévêque Guichard Tavelli, apparenté à la Maison de Savoie et soutenu par elle, voit sélever contre son autorité le seigneur de Niedergesteln, Pierre de la Tour, qui cherche à se libérer de ses obligations de vassal. Il sollicite donc laide dAmédée VI, dit le Comte Vert. En 1351, le Savoyard intervient. Il attaque Martigny, puis Ardon et Chamoson Après sêtre emparé de Sion, il sétablit à Salquenen où il exige la soumission des communes favorables à Pierre de la Tour, au printemps 1352. Mais 12 Haut-Valais se soulève peu après. Le Comte Vert reprend les armes; il pille et incendie la ville de Sion et, le 8 novembre 1352, il impose une paix très sévère aux communes insurgées contre leur prince. Mais la volonté de sémanciper du pouvoir épiscopal anime toujours les communes haut-valaisannes qui jurent de se secourir mutuellement, le 10 avril 1355. Comme le Comte Vert prête hommage à lempereur Charles IV, il ne leur reste quà conclure la paix avec le comte de Savoie. Cest la paix dEvian du 11 mars 1361, par laquelle Amédée VI renonce à la charge de capitaine du Valais et à toute immixtion dans les affaires temporelles de lévêque.
Antoine de la Tour, fils de Pierre, sinsurge à son tour. Tandis quil obtient lappui de la Savoie, lévêque rallie à sa cause les communes haut-valaisannes. Par la paix de Saint-Maurice, le rebelle se soumet. Cinq ans plus tard, il pénètre cependant dans le château de la Soie où réside lévêque Guichard; il sen saisit et le précipite au bas des remparts. Scandalisées par cette barbarie, les communes se placent sous la conduite de Pierre de Rarogne et, en 1375, ruinent définitivement la puissance des sires de la Tour dans le Valais.
La lutte contre la Savoie se poursuit sous le successeur de Guichard Tavelli, Edouard de Savoie. Amédée VII, dit le Comte Rouge, intervient à plusieurs reprises contre les communes qui se sont soulevées à linstigation de Pierre de Rarogne. En 1384, il détruit partiellement la ville de Sion; en 1387, il savance jusquà Salquenen avant dentreprendre des raids contre les possessions des de Rarogne dans le val dAnniviers et dincendier le château de Beauregard au-dessus de Niouc. Mais lannée suivante, il se fait battre à Viège. Après sa mort, en 1391, un traité de paix est signé, le 24 novembre 1392. La Morge de Conthey devient la limite entre la Savoie et le Valais.
A la mort de Pierre de Rarogne, son fils Guichard accède à la dignité de grand bailli. Son ambition, son orgueil et ses prétentions mécontentent la population qui se soulève contre la Maison de Rarogne. En 1415, Guichard doit accepter les exigences des Patriotes qui sassurent une participation au gouvernement. La paix ne dure pas. Le 4 mai 1416, Guichard fait assommer par ses gens darmes les membres de la diète quil a convoqués à Platta. Le peuple, indigné, décide sa séparation davec la Maison de Rarogne. Tandis que Guichard sallie aux Bernois, les dizains, à lexclusion de Rarogne et de Loèche, refusent toute tentative de conciliation proposée par quelques cantons confédérés. Berne organise donc une expédition militaire contre les Valaisans. Des bandes armées descendent le Sanetsch, semparent de Sion le 17 octobre 1418, pillent la cathédrale et le château épiscopal avant dincendier la ville. Dès le début de lannée suivante, les raids bernois se multiplient; ils préludent à une attaque en tenaille contre les Valaisans. Le contingent qui pénètre par le Sanetsch est refoulé; le gros des troupes bernoises subit une sanglante défaite à Ulrichen, au début du mois doctobre 1419. La puissance de la Maison de Rarogne est anéantie Guichard et son neveu Guillaume Il acceptent de quitter le Valais.
Grandis par leurs succès, les députés des dizains, appelés les Patriotes, sefforcent détendre leurs droits politiques. Ils obtiennent de participer au gouvernement, délire les représentants des dizains à la diète, de choisir leurs châtelains et de concourir à la désignation de certains fonctionnaires épiscopaux. En janvier 1446, ils arrachent même à lévêque les Articles de Naters qui sont rapportés dès 1451.
Lépoque des guerres de Bourgogne
Le 31 août 1446, lévêque sassure laide de Berne et de la Savoie contre les prétentions des Patriotes. Les trois souverains sengagent à ne point protéger sur leur territoire un ressortissant des deux autres Etats sil sy rendait dans une intention hostile. Or la Savoie accorde son soutien à Rodolphe Asperlin, beau-frère des sires de Rarogne. Des frictions nombreuses enveniment en outre les relations entre Contheysans et Saviésans dans la vallée de la Morge qui délimite le Valais savoyard et le Valais épiscopal.
Yolande, duchesse de Savoie, obtient lappui de Genève, de la Bourgogne et de Milan. Lévêque Walter Supersaxo se rapproche de Berne et des cantons suisses. Quand Berne entreprend la conquête du Pays de Vaud, en 1475, les troupes de lévêque marchent contre la garnison ducale dans le bourg de Conthey. Larmée savoyarde savance sur Sion le 13 novembre. La ville est presque prise quand les Haut-Valaisans accourent à son secours. Mais ceux-ci sont près de succomber sous le nombre de leurs adversaires lorsque trois mille Confédérés environ, qui ont franchi le Sanetsch, font pencher la victoire du côté des Valaisans. Lennemi senfuit. Les vainqueurs les poursuivent jusquà Saint-Maurice. Sur leur passage, ils brûlent les châteaux de Conthey, de Saillon, de Saxon et de Saint-Maurice; ils saccagent ceux de Sembrancher et de Bourg-Saint-Pierre; ils dévastent celui de la Bâtiaz, à Martigny.
La guerre recommence lannée suivante. Une nouvelle fois, elle tourne au désavantage de la Savoie. Le 31 décembre 1476, lévêque et les députés de la diète proclament que tout le pays conquis jusquau défilé de SaintMaurice est incorporé au domaine épiscopal et au territoire des Sept Dizains. La Savoie ne reconnaît juridiquement cet état de fait quen 1528. Pour longtemps, désormais, le Valais se trouve dégagé de toute domination étrangère.
Durant les guerres de Bourgogne, le duc de Milan sétait prononcé en faveur de Charles le Téméraire. Il en résulte une période de tensions entre Milan et le Valais. Celle-ci saggrave dès laccession de Josse de Silenen au trône épiscopal en 1482. Des accrochages opposent même les populations paysannes dans les régions frontalières du val de Gondo. Aussi le Valais renouvelle t'il son traité dalliance avec les Waldstaetten, le 10 août 1484, avant que les troupes de lévêque franchissent le Simplon en dépit de lopposition de quatre dizains. Elles semparent du pont de Crevola. Mais lintervention des Confédérés, gagnés par lor milanais, entraîne une suspension des hostilités et le repli des Valaisans. Par deux fois, Josse de Silenen tente de semparer de lOssola. Finalement, au mois de janvier 1495, les belligérants signent la paix de Milan.
La politique francophile de Josse de Silenen mécontente les Confédérés et les Valaisans. Georges Supersaxo soppose à lévêque qui le cite en justice pour haute trahison. Le peuple se déchaîne contre son prince et le force à se démettre de sa charge. Le 20 avril 1496, la diète lui donne un successeur en la personne de Nicolas Schiner. Grâce à lhabileté diplomatique du jeune Mathieu Schiner, la papauté valide les mesures imposées par la diète.
Trois ans plus tard, Nicolas Schiner résigne ses fonctions. Mathieu Schiner reçoit la mitre et la crosse. Il saffiche adversaire déterminé de la France; il soutient avec passion les efforts de la papauté contre les Français en Italie. Jules II reconnaît ses mérites et le crée cardinal, le 7 mars 1511.
Sous limpulsion de Schiner et grâce au concours des Vénitiens, les Confédérés chassent les Français hors de lItalie, au mois de mai 1512. Ils occupent le Milanais; ils s emparent à nouveau de leurs possessions italiennes quils avaient perdues à la suite de la bataille dArbedo, le 30 juin 1422. De leur côté, les Grisons envahissent Bormio, Chiavenna et la Valteline. Le 29 septembre et le 3 octobre, ils signent avec Maximilien Sforza un traité et une alliance qui les font protecteurs de lEtat milanais. Le 6 juin 1513, les Suisses remportent lune de leurs plus illustres victoires, celle de Novare. Mais la fortune des armes ne tarde pas à changer de camp.
Traqué par la haine de Mathieu Schiner, déclaré ennemi de la patrie par la diète, poursuivi à Neuchâtel et à Fribourg avant dêtre incarcéré au château Saint-Ange, à Rome, en 1513, Georges Supersaxo nattend que lheure de la vengeance. Elle sonne à Marignan, les 13 et 14 septembre 1515. Là, au terme dun combat si disputé que François 1er écrit à sa mère Louise de Savoie «... depuis deux mille ans on n avait vu une si fière, ni si cruelle bataille», la puissance des Suisses seffondre en même temps que celle de Mathieu Schiner. A son tour, il endure le bannissement tandis que les Valaisans ploient sous la puissance tyrannique de Georges Supersaxo. Mais, en 1529, celui-ci senfuit à Vevey pour échapper à la vindicte populaire.
Les divisions confessionnelles
La longue rivalité qui oppose les partisans de Schiner à ceux de Supersaxo, la volonté de puissance temporelle affichée par lépiscopat, lindignité trop commune du clergé, lignorance des fidèles pour les questions religieuses forment un ensemble de causes favorables au développement du protestantisme. Dès 1526, le pape Clément VII ordonne au chapitre de Sion «de procéder sommairement contre les gens adonnes aux pratiques superstitieuses, les luthériens, les hérétiques, les fauteurs et les sectateurs de lhérésie et de les punir». Le Valais demeure pourtant attaché à sa foi. En 1529, il signe une alliance perpétuelle avec les cantons catholiques. Il participe à leurs côtés aux guerres de Kappel. Pendant ce temps, Berne favorise limplantation de la Réforme dans le mandement dAigle.
En 1536, les Bernois envahissent le Pays de Vaud et, depuis Genève, marchent contre le Chablais. Sollicités dintervenir, les Valaisans se portent jusquà Thonon sans rencontrer de résistance. Ils établissent des gouverneurs à Monthey et à Evian.
La position du catholicisme saffaiblit depuis lors jusquà la fin du XVIe siècle. Les évêques Jean Jordan et Hildebrand de Riedmatten se montrent incapables de résister à la propagation du protestantisme. En 1551, la diète proclame la tolérance religieuse, respectée durant une vingtaine dannées. Il arrive que les dizains assemblés décrètent le bannissement des apostats et linterdiction denvoyer les jeunes Valaisans dans les villes protestantes afin dy poursuivre leurs études. Mais ces mesures demeurent lettre morte. Hildebrand de Riedmatten, inhabile déjà à diriger le clergé, parvient encore moins à obtenir lobéissance des fidèles. Le pape Clément VIII, en 1592, le presse de réagir «La première et la plus grande préoccupation dun évêque, lui écrit-il, doit être de conserver et défendre la religion catholique sans laquelle cen est lait du salut des âmes.» Le vieil évêque proteste mais nagit pas. La haute magistrature du pays, des membres influents de la diète accordent leur faveur à la Réforme. Plus encore, le bailli Jossen Gilles fait afficher sur le mur de la cathédrale lécriteau révélateur de son espérance «Hildebrand de Riedmatten, dernier évêque de Sion.» Quelques mois plus tard, en novembre 1603, Adrien de Riedmatten est investi de la charge de vicaire général. Au mois de décembre 1604, à la mort de son oncle, il accède à la dignité épiscopale.
Depuis deux ans déjà, des efforts dévangélisation catholique se poursuivent sur le territoire valaisan. Sous limpulsion du pape Clément VIII, deux capucins savoyards sont dépêchés dans le Bas-Valais tandis que le Haut-Valais en reçoit deux autres venus de Lucerne. En 1607, les missionnaires prêchent à Sion. Le clergé lucernois les épaule grâce au concours de ses prêtres. En 1607 encore, les jésuites ouvrent une école à Venthône et à Ernen. Cest alors que les partisans du protestantisme pensent assurer leur victoire en abaissant la puissance politique de lévêque.
Les dizains contre le pouvoir temporel de lévêque
A la mort dAdrien Il de Riedmatten, en 1613, les Patriotes obtiennent du chapitre la renonciation à la Caroline, cest-à-dire à la prétendue donation du Valais à saint Théodule par lempereur Charlemagne. Hildebrand Jost la signe dès son élection à lévêché. Les manifestations dindépendance des Patriotes se multiplient. En 1618, la diète renouvelle lalliance avec Berne, puis avec les Grisons, sans le consentement de lévêque. Les jésuites sont expulsés en 1627. Antoine Stockalper, fidèle partisan de lévêque, est condamné à mort, au mois de novembre de la même année. Hildebrand Jost est gardé à vue; il est dépouillé de toutes ses prérogatives politiques. Craignant pour sa vie, il accepte de sétablir à Lucerne auprès du nonce. Il se rend ensuite à Rome pour y plaider sa cause avant de regagner son diocèse en 1630. A son retour, il est arrêté et incarcéré au manoir dEtiez. Il ne revoit sa capitale que vers la mi-novembre. Trois ans plus tard, le 9 janvier 1634, lévêque et le chapitre renoncent définitivement à la Caroline. Le 22 décembre 1637, le chapitre confirme cette décision.
Durant tout le XVIIe siècle, lévêque et le chapitre ne montrent pourtant guère dempressement à observer les dispositions imposées en 1613 par les Patriotes lors de lélection de lévêque Hildebrand Jost. Ceux-ci tiennent fermement à leurs droits acquis; lévêque nattend que loccasion favorable de recouvrer son ancienne souveraineté. Les dernières manifestations de ces oppositions se déroulent à la suite de lélection de Jean-Joseph Blatter à lépiscopat, en 1734.
Pendant un demi-siècle, le Valais vit dans une tranquillité politique presque totale. A peine la «guerre du vin rouge», en 1755, apporte-t-elle une touche de bellicisme. Les horizons des Valaisans ne dépassent guère les limites de leurs dizains et celles de leurs territoires sujets.
Lépoque, pourtant, est à leffervescence. Les revendications les plus diverses surgissent dans les Pays suisses. Elles vont néanmoins toutes dans le sens dune exigence de droits plus étendus pour les populations. Après la conjuration Henzi, linsurrection de la Léventine et laffaire Gaudot, lagitation se transforme en révolution. Nicolas Chenaux va jusquà promettre à ses partisans labolition des dettes, létablissement dune loi agraire et, aux fermiers, la libre possession des terres quils tiennent à bail. La révolution genevoise du 8 avril 1782 se propose daccorder une participation aux droits politiques et une entière liberté industrielle et commerciale à la classe désavantagée des natifs. On sélève partout contre légoïsme des gouvernements aristocratiques. On nimagine davenir heureux que dans la liberté des individus et dans légalité des hommes.
Les Valaisans dexpression française se laissent à leur tour imprégner par ces idées dont le siècle des lumières est lapôtre. Un des leurs, le notaire montheysan Gabriel Guerraty, exprime les raisons du mécontentement de ses compatriotes bas-valaisans.
«Dans ce pays aussi, une partie dun peuple faisait sentir le poids de la domination sur lautre. Un peuple libre voulait avoir des sujets et exercer sa domination sur des inférieurs à linstar dorgueilleux monarques qui croient que les hommes existent pour les servir, et qui croient que ces derniers sont leur patrimoine. Les Haut-Valaisans, infatués de lidée que leur domination sur le Bas-Valais était de droit divin et devait être éternelle, agissaient comme si la puissance souveraine quils exerçaient sur le Bas-Valais ne leur imposait aucun devoir, quils pouvaient tout oser; les gouverneurs ou baillis, quils envoyaient pour régir le Bas-Valais et qui avaient carte blanche, croyaient que tout leur était permis arbitraire, concussions, vénalités, prohibitions quil était permis denfreindre moyennant payement dune finance; il fallait acheter la permission de saffranchir de ces odieuses prohibitions qui navaient point dautre but que dextorquer par-là des impôts indirects et arbitraires, et si lon venait à les enfreindre, les gouverneurs exigeaient des amendes à la rigueur. Ces prohibitions étaient nuisibles au commerce et y mettaient des entraves. Il fallait sans cesse faire des représentations au gouvernement pour les faire abroger, et il fallait toujours de largent pour en obtenir labolition. Le caprice, lintérêt sordide, le but dopprimer faisaient établir ces prohibitions qui produisaient, ou des amendes en cas de contravention, ou une finance pour accorder le droit de les enfreindre. Ces prohibitions étant levées, on en établissait dautres ayant le même résultat tantôt, cétait une défense dexporter le beurre et le fromage, tantôt le bétail, tantôt les grains, ce qui cependant était la ressource pour importer du numéraire. Cétait des députations sans fin envoyées dans le Haut-Valais, et pour se présenter devant les hauts magistrats souverains seigneurs, il ne fallait pas avoir les mains vides. »
Les populations sujettes de la république des Sept Dizains entendent secouer le joug qui les oppresse. Les symptômes de mécontentement se multiplient à un tel point que la diète de mai 1790 discute des mesures à prendre pour mettre un terme à loppression que les hauts fonctionnaires exercent sur les sujets du Bas-Valais. Les propos que lon colporte au sujet de la liberté française trouvent un écho favorable dans les territoires occidentaux du Valais. Les exaltés ny rêvent que de révolution. Les notables de Saint-Maurice et de Monthey naspirent par contre quà recouvrer pour eux les avantages politiques et économiques dont ils sont frustrés depuis longtemps.
Limagination populaire, qui a besoin de héros pour entretenir sa flamme, trouve un champion de la liberté dans la personne de Pierre-Maurice Rey-Bellet, surnommé le «Gros-Bellet». Ne sest-il pas opposé ouvertement au gouverneur le plus arrogant qui fût, Hildebrand Schiner, le 8 septembre 1790 ? Ne la-t-il pas forcé à chercher refuge auprès du bailli bernois de résidence à Aigle ? Lannée suivante, la conjuration des Crochets dont les projets sont surtout criminels ajoute un élément supplémentaire de troubles dans les territoires du Bas-Valais. Dans le Haut-Valais lui-même, les scènes dagitation ne manquent point. Aussi, en diète de décembre 1792, lévêque demande-t-il lappui de lEtat pour rétablir lordre public.
Dès que Michel Mangourit sinstalle à Saint-Maurice durant les premiers jours du mois de janvier 1798, en qualité de résident de France, leffervescence politique se poursuit de plus belle. Le 28 janvier, on plante un arbre de liberté dans la ville de Saint-Maurice; le lendemain, les mandataires des communes bas-valaisannes déclarent leur pays indépendant. A linvitation du résident, lAssemblée générale du Bas-Valais nomme une commission de trois membres pour élaborer un projet de constitution. Elle le lui remet le 24 février. Mangourit, insatisfait, dirige la rédaction dun second projet qui fonde la démocratie représentative et qui doit assurer dimportants avantages économiques au Valais. La diète laccepte le 13 mars. Cette décision se révèle inutile, car déjà lautorité française en dispose autrement. Elle ne veut plus dun Valais indépendant. Les Valaisans nont quà se soumettre.
En 1815, le canton du Valais entre dans la Confédération Suisse
Kantonsauswahl | Canton selection | sélection des Cantons | selezione del Cantoni
Topic Selection | Themenauswahl | Choix de Thèmes | Argomento